On se saurait lâaccepter sans interruptions interrogatives. Car [...] exister en Afrique, câest renoncer à lâêtre individuel particulier, compétitif, égoïste, agressif, conquérant, pour être avec les autres dans la paix et lâharmonie avec les vivants et les morts, avec lâenvironnement naturel et les esprits qui peuplent ou lâaniment. Encore faut-il bien en étudier la portée, lâextension et analyser le contexte 21. La raison nâest pas seulement quâelles sont essentialistes et enferment lâAfricain dans une identité collective factice, voire racio-culturelle fausse et anhistorique, mais, de plus, elles servent de base à des tentatives de définition et à des affirmations normatives relatives à la soi-disant démocratie africaine. I would say, for example, that it is shaped by the more than 99 percent of our genes that we all share, by the fact that our closest common ancestor may have lived a little more than a hundred thousand years ago. En plus dâessentialiser les cultures africaines et occidentales dans leur ensemble, elles ne prennent pas en considération, premièrement, le fait que le lieu dâémerÂgence dâune idée ne dit rien sur la portée de la validité de cette idée. Toutefois, sâil est permis de dire quâune telle approche ne nous est plus disponible, on peut au moins en ébaucher la fondation, la question fondamentale, sous la forme dâune esquisse dâune théorie de la légitimité du pouvoir postcolonial. Auteur et éditeur de plusieurs articles et ouvrages, entre autres : Naturalismuskritik und Autonomie der Ethik (1988), Identité : Évolution ou Différence (Éd.) Wiredu parle de la culture Akan dont la sagesse peut informer la démocratie. Elles se divisent, grosso modo, en deux groupes : celles qui sont dâobédience empiriques et celles qui sont normatives. Postcolonialité et légimitité du pouvoir politique en Afrique. Alors que Appiah se confronte directement à la pensée kantienne, la reconstruit et tente de la dépasser pour défendre lâidée dâune communauté « biologique » de tout homme 28, Mbembe tente dâouvrir ladite pensée africaine à une dimension plus large, plus cosmopolitique. Ou, comme le choix du mal radical, ils ont consciemment décidé dâignorer toute altérité qui menacerait leurs intérêts 15. Le pouvoir politique en Afrique: Pourquoi est-il si difficile de renoncer au pouvoir? Sâinterroger, dès lors, dans certains pays, sur ce que les structures de parenté entre les Lovedu en Afrique australe ont de commun avec les Wolof du Sénégal pourrait bien être déjà tabou, voire dangereux, car câest tenter de remettre en cause les thèses de lâunité culturelle de lâAfrique. 24En négligeant la prise en compte de la question de légitimité de lâÃtat et en se concentrant presque exclusivement sur lâautonomie culturelle, les sciences sociales et la philosophie ont conduit la pensée africaine à un redoutable réductionnisme, voire à un cul-de-de sac. Pourquoi nây trouve-t-on pas un engagement à faire des démocraties authentiquement française, allemande, suédoise ou italienne alors que, dans le contexte africain, on parle dâune démocratie fondée sur une culture continentale qui nâexiste pas ? 9 Nous étions en 1982 et les choses nâont guère changé. Dâun point de vue universel, la colonisation et de nombreuses situations de la postcolonialité, sont condamnables. 26 Rappelons que lâarticle 2 stipule : « Toute personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment de race, dâethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, dâopinion politique ou de toute autre opinion, dâorigine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». Mais eux aussi souffraient de la tache aveugle, de cette cécité, qui fait de lâhistoire politique africaine un récit manichéen. Ne prescrivant à lâindividu aucun devoir particulier envers les entités quâelle énumère, elle ne saurait servir à justifier a posteriori lâimposition dâun de ces devoirs. DANS LA TRANSITION DÉMOCRATIQUE. Elles présentent bien des différences malgré lâadoption des mêmes principes. (1989) ; Philosophie du droit (1991, avec Alain Renaut) ; Subjectivité, Démocratie et raison pratique/Self, Democracy and Practical Reason (Ed.) The Keys Concepts, 2e édition, Routledge Londres, New York, 2000, p. 168-175. Non seulement du point de vue anthropologique culturel, il serait aberrant de parler dâune culture africaine, le continent étant loin de former une unité culturelle, mais identifier la culture occidentale â peu importe par ailleurs ce que recouvre ce concept â à la seule vision technoscientifique du monde moderne nous semble fort discutable. Câest davantage façonner son histoire que la subir et en même temps déterminer le cadre dans lequel lâétat postcolonial est né. Il parle dâune communauté mondiale avec Kant où sâenchevêtrent les dimensions locale et globale : « The concept of a common humanity clearly lies at the base of references to the âinternational communityâ, âthe world communityâ, âthe global communityâ frequently made by diplomats, politicians, and world leaders of different national or cultural communities. Le qualificatif dâafricain ne saurait dispenser de cultiver la tradition philosophique dans laquelle la philosophie africaine veut sâinsérer pour des raisons évidentes, encore moins nous dispense-t-il de penser les conditions dâun Ãtat particulier, lâÃtat postcolonial en Afrique qui, comme le dit Mbembé, vit à lâ« âge de la violence du frère à lâégard du frère » à un âge où « le frère et le frère ennemi ne font quâun » 6. 27 à ce sujet, ce commentateur de la Charte, Fatsah Ouguergouz écrit, relativement au devoirs de lâindividu de defendre les valeurs africaines : « Cette disposition nâa pas une grande portée juridique en raison précisément de sa généralité. Mais je ne veux pas non plus me perdre dans un universalisme décharné. démocratiques occidentaux importés en Afrique, de redéfinir un modèle politique « à l'africaine », qui tienne compte des composantes des sociétés africaines. Ce cadre est celui de la recherche dâune fausse identité parce que fictive et réactive dans un Ãtat postcolonial quâelle prend pour acquis et ne remet jamais en question. 39Il sâagit là dâun moment négatif du choix des principes de liberté et dâégalité impliquant des droits opposables à lâÃtat, donc des principes de non-ingérence, de libertés négatives. Câest ce quâindiquent ces ouvrages dont les titres se passent de commentaires. En démocratie, le pouvoir est idéalement conquis et exercé en vue d’appliquer un programme politique, mais on sait là aussi qu’il n’en est pas toujours ainsi. Comment identifier ces institutions et en quoi sont-elles démocratiques dans le sens dâune démocratie avec des droits égaux et des libertés égales dont nous disions que les Africains les auraient choisis ? Une théorie réflexive sur lâhistoire africaine conduirait ainsi les individus à donner exclusivement la priorité à la liberté et à lâégalité. ., p. 64-65. cit., p. 664-671, spécialement p. 669-671. , tome LXVII, 2011, p. 650-663 qui présente le débat africain sur la démocratie de façon très synthétique. LâÃtat ou lâOUA en décide). 15Que les politiques, lors des indépendances, aient opté pour la conservation des frontières héritées de la colonisation câétait un choix politique et pragmatique, même si on peut dire aujourdâhui, avec le recul, que cette option nâétait pas la seule disponible et quâelle nâétait pas sans alternative pour des gens qui, tous, parlaient de lâunité africaine. 16Mais alors, si la question de la légitimité de lâÃtat postcolonial sâimpose, en quel termes la formuler et pourquoi est-ce que ce serait les principes de liberté et dâégalité que les Africains choisiraient comme base de leurs institutions publiques ? I happen to believe that there is such thing as a universal human biology, that there is a biological human nature. Plus subtil, le second investissement propose que, pour quâelle soit africaine, la démocratie doit sâinspirer des formes de démocraties existant en Afrique et surtout des traditions africaines en matière de démocratie 22. Dans la mesure où elle se conçoit comme le discours de lâémanÂcipation de tous les Africains, mais sâest sous-déterminée, amputant lâhisÂtoire de la part de responsabilité qui revient aux Africains eux-mêmes, dans ce qui les a conduits à la situation postcoloniale en se comprenant comme un mouvement ethno-racial, culturel et identitaire, elle démontre son inaptitude à poser la question de la légitimité de lâÃtat postcolonial dans sa radicalité. 40Peu de gens apprécieraient lâesclavage, la soumission ou la servitude, même au nom du développement social et économique, même au nom des dites valeurs africaines pour lesquelles ils préféreront vivre libres plutôt que mourir. L’après-pouvoir, est synonyme d’autocensure ou de « subite amnésie ». Difficile à comprendre quand on prend en considération toutes les énergies déployées par beaucoup dâécrivains pour défendre de leur plume les valeurs culturelles africaines alors que le plus puissant instrument de la colonisation, lâÃtat colonial et surtout postcolonial, qui a anéantit ces valeurs et qui représente le symbole de lâinstitutionnalisation de cet anéantissement, est accepté sans remise en question. GENERALITES SUR L'EXERCICE DU POUVOIR EN AFRIQUE Nombre de spécialistes contemporains définissent la science politique comme l'étude du pouvoir. Philosopher en Afrique, Paris, août-septembre 2011. , Paris, Fribourg, Cerf, Ãditions universitaires de Fribourg, 1989, p. 48. 22Préoccupée par la valorisation des cultures traditionnelles, souvent mal connues des écrivains eux-mêmes et idéalisées, pour attester leur humanité, la philosophie nâa pas pu tenir compte du lieu, du cadre dans lequel elle se déploie. 32Il est vrai que dans les conditions dâextrême pauvreté et dénuement, notre réflexion découvre bien vite ses limites. ), Post-Colonial Studies. Mais sâil y a une véritable tentative dâune théorie de la légitimation du pouvoir politique, câest chez Gyekye quâon la trouvera. On voit mal comment chaque philosophe de chaque peuple proposerait sa sagesse pour la gouvernance dâun Ãtat moderne comme le Ghana. Le refus de lâexploitation et le souci du progrès dont la race noire est porteuse peut tout justifier aux dépens de lâindividu et surtout quâune Charte des droits de lâhomme soit transformée en instrument de défense de la culture qui, aujourdâhui, peut évoquer son identité pour torturer et opprimer des gens sur la base de leur orientation sexuelle, par exemple, tout en dénonçant dans son préambule les discriminations pour immédiatement violer la lettre et lâesprit de lâarticle 2 26. Sur la base de l’observation, en Afrique, bien qu’élu au suffrage universel, le président de la République exerce le pouvoir comme dans une monarchie. 26Par où se laisse mesurer à quel point la pensée philosophique en Afrique a renoncé à la tâche de se pencher sur la situation politique postcoloniale, caractérisée par le maintien, sous dâautres formes, des rapports de sujétion de lâÃtat africain à la métropole au plan géopolitique et économique. cit., p. 64-65. 51La Charte africaine des droits de lâhomme et des peuples (1981) reflète sans aucun doute ce quâil convient dâappeler la pensée africaine, la philosophie africaine, qui pour une grande part, consiste à énoncer ce quâest lâAfricain. Lâexpérience de cet arbitraire suffit largement pour justifier le choix de la liberté et de ce qui la rend possible : lâégalité. Elle affirme une différence quâelle ne prouve pas. Les Africains ne peuvent plus se réclamer dâaucun de ces éléments culturels ni des discours identitaires ethno-raciaux qui, loin dâembrasser la totalité des éléments constitutifs de leur situation historique, les a conduits à la débâcle que représente la situation postcoloniale. (2017) ; Kant et les penseurs de langue anglaise (Éd., avec Mai Lequan et Sophie Grapotte) (2017). Jusquâà quel point toute forme de délibération consensuelle est-elle une démocratie ? Par BEN MESSAOUD, Sonia, KALA LOBE, Suzanne Le pouvoir politique ou la structure du pouvoir en dernière instance, qui dirige nos vies à tous, c’est ce fameux niveau de la politique où sont les décisions les plus fortes, où sont aussi les instance d’autorité, dans lesquelles le machisme et la discrimination sont aussi les plus forts. cit., p. 130 et suivantes. Le préambule en donne la confirmation : Les Ãtats membres de lâOrganisation de lâunité africaine « tenant compte des vertus de leurs traditions historiques et des valeurs de civilisation africaine qui doivent inspirer et caractériser leur réflexions sur la conception des droits de lâhomme et des peuples et reconnaissant que, dâune part, les droits de lâhomme sont des attributs de la personne, ce qui justifie leur protection internationale et que, dâautre part, la réalité et le respect des droits du peuple doivent nécessairement garantir les droits de lâhomme (â¦) sont convenus de ce qui suit ». Il serait dâailÂleurs incompréhensible de choisir autre chose que la liberté. Ils préféreront vivre sans domination plutôt que de vivre sous le joug dâun Ãtat colonial et postcolonial illégitime. Si l'on en croit Alain, les hommes libres « savent bien que tout pouvoir abuse et abusera » (politique, LXVII). Elle oublie que la démocratie moderne est la résultante de conquêtes historiques. Voir Sur la « Philosophie africaine ». Inutile de se demander de quels peuples il sâagit et en quoi ils garantissent la protection des droits de lâhomme. Revue Politique étrangère : « La démocratie en Afrique : tours et détours », Été 2019. Et pourtant, même si l'on en rêve parfois, on ne conçoit pas de société humaine sans pouvoir. Le pouvoir selon le dictionnaire Robert est : « la capacité ou les moyens dont dispose un individu [dans notre contexte les femmes] pour faire quelque chose, accomplir une action » sur les plans économique, social et politique. édition, Routledge Londres, New York, 2000, p. 168-175. ET STRATÉGIE ÉCONOMIQUE. 23 Voir un plus ample développement notre « Identität : Evolution oder Differenz / Identité : Ãvolution ou différence », op. Encore faut-il leur reconnaître le mérite dâavoir amorcé un début de réflexion qui, si elle avait été prise au sérieux et poursuivie, aurait pu déboucher sur la question de la fonction et de la légitimité de lâÃtat postcolonial. Le dialogue politique en Côte d'Ivoire a été suspendu mardi sans qu'un accord formel n'ait été trouvé. 48Encore faut-il quâelle prenne en considération les problèmes épistémologiques que pose une telle démarche. On peut bien comprendre le souci de revaloriser les cultures africaines précoloniales. Comme le formule Niklas Luhmann à la suite de Max Weber, la légitimité étudie pourquoi des individus, rationnels par ailleurs, se soumettent à lâautorité de tel ou tel pouvoir. 18Si le colonialisme est condamnable, accepter et assumer tacitement son héritage, lâÃtat moderne africain, sans le questionner, lâest tout autant. 52La Charte se transforme ainsi en instrument de lutte pour la promotion des valeurs africaines positives. 77, Karthala, Paris, p. 90-106 et à lâarticle : « Philosophie, démocratie et pratiques : à la recherche dâun « universel latéral », in Critique, 2011, p. 672-686. Nous étions en 1982 et les choses nâont guère changé. Natif d’Accra, Amoako Boafo est un artiste peintre révélé en 2020 lors de la foire d’art contemporain Art Basel Miami. Il en forme, au moins, la base. Essai sur lâimaginaire politique dans lâAfrique contemporaine, Karthala, Paris, 2000, p. xii. L’alternance est piégée aux petits jeux de révisions interminables de la Constitution. Gray, 1862; Christianity, Islam and the Negro Race, London, W. B. Whittingham & Co., 1887 ; 1888 ; University of Edinburgh Press, 1967 ; reprint of 1888 edition, Baltimore, Maryland: Black Classic Press, 1994 ; African Life and Customs, London, C. M. Phillips, 1908 ; reprint Baltimore, Maryland: Black Classic Press, 1994 ; West Africa Before Europe: and Other Addresses, 1901 et 1903, London, C. M. Phillips, 1905. Elle fait de la démocratie lâexclusivité des sociétés occidentales. Elle est lâhistoire dâune défaite totale, plus précisément dâune triple défaite provenant du fait que les Africains, à cause de leur division, nâont eu de résistance à offrir que la division et la participation à lâesclavage, à la colonisation repris par lâÃtat sous la forme de la postcolonie. On a plutôt lâimpression du contraire du moin. Il sâagit de sauvegarder les valeurs et vertus de solidarité que dâautres peuples ont perdues » 24. No. Dans ces conditions, qui sont aussi celles du pluralisme politique moderne, la question de la justice politique devient la recherche de principes sur lesquels tous se mettront dâaccord â ou à défaut, la majorité â afin dâorganiser les institutions de base de la société, pour reprendre une expression de Rawls dans sa Théorie de la justice. (2015) ; Systèmes psychiques et systèmes sociaux (Éd.) citée, Paris, 2004, p. 7 et p. 23-24. Câest une domination de fait et en tout cas illégitime. Elle oublie surtout que, dans les sociétés stratifiées dâEurope, dans lâAncien Régime par exemple, lâordre social et politique nâétait pas démocratique. Auquel cas, le conseil délibératif de la palabre ne serait pas une délibération entre des personnes libres et égales, mais obéirait à un principe gérontocratique. Cette définition empirique se distingue des critères qui rendent a priori légitime lâexercice dâun pouvoir. Puisquâil nây avait pas lâanarchie mais des ordres politiques avec leur grandeur et leur misère, LâÃtat postcolonial demeure une institution importée 18. Lâauteur qui défend cette idée est Kwasi Wiredu, , Bloomington University Press, 1996, p. 114, et surtout p. 137 ; pour une récente prise de position sâagissant de la Charte africaine des droits de lâhomme et des peuples, voir Fanny. 2 Critique. Lâadministration des prétendues preuves dont « la fonction est de disqualifier les fictions africaines de lâOccident, de réfuter sa prétention à monopoliser lâexpression de lâhumain en général et dâoùÂvrir un espace où lâAfricain pourrait enfin se raconter à lui-même ses propres fables dans une voix inimitable parce quâauthentiquement sienne » 16. Pour une discussion du concept de postcolonial lui-même, il existe une abondante littérature, voir Stuart Hall, Identités et cultures. 3Ce qui est loué ici, câest, dâune certaine manière, une perspective interdisciplinaire. 5 Nous sommes conscients de la place faite aujourdâhui aux philosophies de la déconstruction, aux pensées relativistes du « anything goes » et même à des déconstructions du droit et de tout discours sur la justice. Nous désignons par cette notion, la période qui a commencé après les indépendances formelles. African Perspectives, Accra, Sub-Saharan Publishers, 2013. 7 Voir à ce sujet Otfried Höffe, Penser un droit pénal interculturel, trad. 17Laissons de côté lâesclavage et la responsabilité refoulée des Africains dans cette tragédie et concentrons-nous sur la colonisation. Nous renvoyons ici à lâexcellent article de Pieter Boele van Hensbroek, « Le « tournant démocratique » dans la philosophie africaine contemporaine », in. Il réclame une rupture dans le débat africain contemporain avec le discours de lâenfermement et dans « What is Postcolonial thinking » plaide pour un universalisme fondé sur la constitution de lâespèce humaine 29. Revue de philosophie et de sciences humaines. Rien que le passage du pouvoir colonial au postcolonial aurait pu constituer un dossier important des écrits sur la décolonisation et enrichir la mémoire collective. , Présence africaine, 1955, éd. En fait, l’acquisition du pouvoir par les femmes et leur accès aux sphères décisionnelles ne peut qu’être La protection de lâindividu passe par les droits du peuple (!) Il nâest pas erroné de voir en lui un des pionniers du panafricanisme, avec W. E. Dubois, Marcus Garvey et George Padmore. Pouvoir politique: pouvoir d’action des femmes en Afrique. cit., p. 16-17. Copier William Lapierre Jean, « 6 - Le plurilinguisme et la politique en Afrique », dans : , Le Pouvoir politique et les langues. I would say, for example, that it is shaped by the more than 99 percent of our genes that we all share, by the fact that our closest common ancestor may have lived a little more than a hundred thousand years ago », Kwame Anthony Appiah, The Ethics of Identity, Princeton, Princeton University Press, 2007, p. 252. En dâautres termes, le fait que la démocratie moderne soit née en Europe ne dit rien sur la lâétendue de sa validité. Notre contribution voudrait sâattaquer de front à ces manquements. Sciences Sociales en Afrique, CODESRIA que nous remercions pour cet appui ... à‑vis du pouvoir contemporain, leur utilité, leur pertinence, leur entregent, ... Il reste le pivot symbolique de la vie politique … Câest pourquoi la philosophie politique, dans le contexte africain, doit poser cette question fondamentale, à savoir si doit être maintenu lâÃtat dont la structure de base, et non les processus de consolidation, demeure un héritage colonial. Amoako Boafo a d’ailleurs vendu un portrait de 2m de haut «Baba Diop» à 1 million 100 dollars, lors d’une vente aux enchères chez Christie’s. Les incohérences de la Charte africaine des droits de lâhomme et des peuples illustre bien cette défaite qui, dâune certaine manière, repose sur une métaphysique essentialiste et de lâenfermement culturel. Les Africains ne perdraient pas pour auÂtant leur identité culturelle, car il sâagit de principes, abstraits, formels, qui prennent différentes formes dans différents contextes socio-culturels et dans les différents univers symboliques où ils sont appliqués. En Côte d’Ivoire, pour les prochaines élections (législatives 2021), parti au pouvoir et opposition ivoirienne se donnent rendez-vous en mars 2021, comme convenu à l’issue du dialogue politique ouvert lundi 21 décembre 2020. En ce sens, le choix des principes correspond à une situation de liberté qui permet, dans un second moment, une renégociation des termes dâun vivre-ensemble. Notre esquisse ne se veut pas nécessairement un projet africain. Pour ne prendre que deux exemples au hasard, Une Couronne pour Udomo (Paris, Stock, 1958) de Peter Abrahams posait déjà le problème de lâÃtat africain et en décrit déjà certains aspects bien avant les indépendances. Et lâon sâétonne que des Africains viennent chercher lâasile â et parfois lâasile politique, dans le monde égoïste, compétitif dont on veut éviter les travers : en Europe ou dans les pays occidentaux. 15 On lira, pour sâen convaincre, Oliver Le Cour Grandmaison, Coloniser, exterminer. 9Sans lâombre dâun doute, les Africains auraient tous choisi, en premier lieu, la liberté et lâégalité, garanties par un pouvoir central sous leur propre contrôle en tant quâindividus et en tant que communautés. Paris cedex 14, Presses Universitaires de France, « La Politique éclatée », 1988, p. 221-248. ©2000-2021 ITHAKA. Donc, ce nâest pas lâabsence de cette approche descriptive que nous regrettons, mais celle de la légitimation qui est une question de philosophie politique. Ãchec également à reconnaître les conséquences de leurs conflits et à en rejeter lâentière responsabilité sur le colonisateur. Câest pourquoi, pour une théoÂrie de la légitimation de lâÃtat postcolonial, toute pensée de lâidentité culturelle doit être rejetée. Published By: Sciences Po University Press, Access everything in the JPASS collection, Download up to 10 article PDFs to save and keep, Download up to 120 article PDFs to save and keep. Même si on ne trouve pas dans ses écrits, la radicalité avec laquelle nous posons la question du choix des principes de justice en tentant dâen esquisser la justification, ses réflexions soulignent la valeur de lâindividu, mais aussi du cosmopolitisme. 55Fort heureusement, il y a une minorité de voix qui prend ses distances et critique ce quâil faut bien appeler un « cartésianisme communautariste » qui conclut de lâaffirmation « je suis » à lâexistences des autres : « nous sommes » et infère du « je pense », « nous pensons » ou, mieux encore, « nous pensons en tant quâAfricains X , donc je pense en tant quâAfricain X », où X est la pensée africaine ou un de ses éléments. Câest bien loin de la réalité historique dâaffirmer que lâÃtat africain nâest quâun pur produit dâimportation. Comme le dit si bien Rousseau, tel se croit le maître et nâen demeure moins esclave. Les Africains ne perdraient pas pour autant leurs cultures car il sâagit de principes formels. Voir toute la conclusion de lâouvrage. Voir un plus ample développement notre « Identität : Evolution oder Differenz / Identité : Ãvolution ou différence ». 4Il ne peut y avoir dâinterdisciplinarité que si chaque discipline apporte sa contribution à la question de lâÃtat en Afrique noire. 18 Dire que lâÃtat moderne est importé en Afrique nâinterdit pas de prendre en considération la complexité du processus ayant conduit à la consolidation des structures qui lui ont donné naissance et surtout de souligner la part de responsabilité des différents acteurs indigènes, notamment des élites traditionnelles et non traditionnelles et dâautres acteurs non indigènes. Câest perdre sa dignité dâhomme, dirait Rousseau. 47La troisième position nous paraît plus raisonnable, elle nâen demeure pas moins discutable. ., p. 664-671, spécialement p. 669-671. , pionnier de la critique de lâethno philosophie. "Dans la vie comme en politique, je n'écarte rien", déclarait-il en décembre 2018 avant de céder le pouvoir. Même dans la revue Politique africaine, dont le numéro 77 est consacré à la philosophie et à lâÃtat en Afrique, câest en vain que lâon chercherait une allusion à cette question qui touche aux fondements même de tout Ãtat et, a fortiori, de lâÃtat postcolonial. On ne peut toutefois pas dire que les citoyens moyens sont dans un état où les questions politiques ne les intéressent absolument pas ou quâils sont uniquement intéressés à la seule survie. 1 Nous utilisons ici le terme postcolonial dans un sens historique et politique. [...] Force est de souligner que non seulement les formules étatiques, mais aussi la rationalité coloniale [...] firent lâobjet dâune réappropriation par les Africains », op. La Charte de la morale africaine, la morale laïque africaine, câest lâOrganisation de lâunité africaine qui sâen charge. Pire encore, elle devient un discours de revendication dâidentité énoncée et immédiatement opposée à la « culture dite occidentale ». Lâauteur qui défend cette idée est Kwasi Wiredu, Cultural Univerals and Particulars, Bloomington University Press, 1996, p. 114, et surtout p. 137 ; pour une récente prise de position sâagissant de la Charte africaine des droits de lâhomme et des peuples, voir Fanny Callede, « Valeurs, traditions et droits de lâhomme en Afrique », Petit juriste, Juin 2011. Coloniser, exterminer. Mais eux aussi souffraient de la tache aveugle, de cette cécité, qui fait de lâhistoire politique africaine un récit manichéen. Il empêche que soient reconduites comme allant de soi les fonctions de lâÃtat colonial sous la forme de lâÃtat postcolonial qui se fait instrument de développement, instrument de défense dâune culture africaine inexistante, dâune identité culturelle à créer. 20 Nous renvoyons ici à lâexcellent article de Pieter Boele van Hensbroek, « Le « tournant démocratique » dans la philosophie africaine contemporaine », in Critique, tome LXVII, 2011, p. 650-663 qui présente le débat africain sur la démocratie de façon très synthétique. Câest cet ensemble de questions quâAristote a désigné par la philosophie politique, qui relève de la philosophie pratique. Seulement NâKrumah aussi a négligé les questions fondamentales relatives au pouvoir postcolonial en Afrique, à savoir celles dâassumer la responsabilité du passé africain, du passé dâesclavage, du refus de reconnaître et dâenseigner un fait historique important, celui du pacte avec lâancien colonisateur.